Bonjour, je suis Alexis Nicolas. Dans ce podcast, je vous propose de partir avec moi en quête
de sobriété, pour en finir avec la démesure de notre époque et pour vivre dès maintenant
dans le futur. Mais en tant qu'ingénieur, salarié, homme, blanc, cis, hétéro, la sobriété
ne s'est pas gagnée. Et oui, l'attrait pour la démesure affecte avant tout les personnes
privilégiées. Episodes après épisodes, théoriques ou pratiques, je mène l'enquête
avec mes invités. On écoute !
Bonjour à vous qui écoutez cet épisode, le cinquième du podcast Enquête de sobriété.
Notre enquête a commencé avec Fanny Hugues à propos des pratiques de débrouille du quotidien.
On a pu me faire le retour que notre débit de parole était assez rapide. N'hésitez pas à
ralentir la vitesse pour profiter pleinement de notre échange. Même chose pour le deuxième
épisode qui est un bonus à ce début d'enquête, pour explorer ce que ces rencontres de chercheuses
ont changé pour Fanny dans son quotidien. En effet, dans ce podcast, je souhaite mettre
en valeur des travaux en sciences humaines sur la sobriété, tout en articulant ce que
ces travaux et ces rencontres nous font, nous changent, nous transforment. Dans le troisième
épisode, avec Nathan Ben Kemoun, nous avons exploré la suffisance intensive. Autrement
dit, ce qu'il y a à gagner dans le renoncement à certaines matérialités. Ce troisième épisode
était probablement moins accessible, plus ardu à appréhender, en tout cas j'ai eu quelques
retours de ce type. Mais pour ce même épisode, j'ai eu d'autres retours d'enquête d'auditeurs
et d'auditrices, que ce soit à propos du chemin de compostel ou sur le tri de nos
livres qui peut être à la fois difficile et libérateur. Dans l'épisode 4, avec Maxime
Privolt, sans le vouloir, le chemin s'est invité dans notre discussion. Nous y discutons de
bivouac dans la première partie, puis d'éducation populaire à la technique et à l'énergie
pour dépasser les injonctions au petit geste et viser une culture de la sobriété. Vous
pouvez retrouver tous les épisodes sur votre application de podcast favorites et sur le
site internet enquete-de-sobriete.fr, sans accent, enquête en un seul mot et au pluriel
et en remplaçant les espaces par des tirets. Oui, j'aurais dû penser au nom de domaine
en imaginant devoir l'expliquer à l'oral. Mais bon, n'hésitez pas à me partager vos
retours d'enquête, vos retours sur les épisodes, vos envies d'enquête pour de futurs épisodes
par email à enquete-de-sobriete, sans accent et avec les tirets, @ pm.me
Dans ce cinquième épisode, je reçois Alexandre Monnin. Alexandre est professeur en redirection
écologique et en design. C'est un épisode assez long, environ 1h30. Ce n'est pas toujours
facile de trouver 1h30 de libre pour écouter un épisode, c'est la raison pour laquelle
j'essaie plutôt de viser 40 minutes max par épisode. Néanmoins, avec Alexandre, nous
abordons de nombreux sujets et je n'ai pas réussi à faire plus court. Ça me donne
une occasion de tester différents formats et surtout si c'est trop long pour vous,
vous avez plusieurs options. Première option, accélérer la vitesse de lecture si vous
y êtes habitué. Je le pratique moi-même de plus en plus, mais je ne vous le recommande
pas pour les épisodes avec Fanny car nous parlons très très vite. Deuxième option,
vous pouvez écouter cet épisode en deux fois, oui après tout c'est vous qui contrôlez
la lecture. Troisième option, vous pouvez aussi passer certains passages. Je pense en
particulier aux auditeurs et auditrices qui connaissent déjà la redirection écologique,
vous pouvez aller directement à environ la moitié de l'épisode dans laquelle nous
parlons d'avantage de sobriété, de renoncement, d'efficacité et de suffisance. En effet,
la première moitié de l'épisode est consacrée à la redirection écologique que j'avais
promis d'approfondir suite à l'épisode 3 avec Nathan. Dans cette première partie,
je propose à Alexandre trois actions de la redirection écologique et il les commande.
Je l'interroge ensuite sur l'évolution dans sa façon de concevoir la redirection écologique
depuis ses premières pières. Et en fin de première moitié, il nous partage ce que
ce travail d'enquête a produit sur lui. Alexandre commence fort en termes de concept,
il utilise les termes ontologiques, eugénisme, malthusien et probablement d'autres encore.
Ne soyez pas intimidés, ces termes sont complexes, je ne suis pas sûr de totalement les
maîtriser, mais ce n'est pas le plus important. En quelques mots trouvés sur Wikipedia,
l'ontologie, c'est une branche de la philosophie qui s'interroge sur la signification du mot et
du verbe être. Et par extension, ontologique est ce qui relève de l'être et de l'essence.
Bon, pas sûr que ce soit beaucoup plus clair, désolé, j'ai essayé. Pour eugénisme,
c'est le fait de sélectionner les individus d'une population selon leur patrimoine génétique.
Et malthusianisme, c'est une doctrine politique, pronant la réduction démographique inspirée des
travaux de Thomas Malthus. Dans la deuxième partie de l'épisode, nous échangeons sur
les différences entre renoncements, sobriété et efficacité, puis nous revenons sur le sujet
de la suffisance intensive, et nous explorons plus en détail ce que suffisance et sobriété veulent
dire. Enfin, dans les 20 dernières minutes de cet épisode, je soumets à Alexandre quatre
nouvelles actions de la redirection écologique en lien avec la sobriété et basée sur notre échange.
Je publierai dans un prochain épisode un bonus à cet échange avec Alexandre. Avec trois
nouveaux actions. Pour ne pas les rater et ne pas rater les prochains et trouver aussi les précédents,
vous pouvez vous abonner au podcast sur votre plateforme préférée. Je suis très curieux
d'entendre et de lire vos enquêtes de sobriété. N'hésitez pas à me contacter par email. Et si
vous appréciez ce podcast, vous pouvez le partager autour de vous et le soutenir avec
cinq étoiles et un commentaire sur les plateformes pour lui donner un peu de visibilité. Bonne écoute.
Salut Alexandre. Salut Alexis. Tu es cité dans le générique de remerciements de ce podcast à
plusieurs titres. D'abord pour ton travail précieux avec tes collègues Diego Landivar et Emmanuel
Bonnet sur la question de la redirection écologique. Et ensuite en tant que directeur du Master
Strategy & Design Pour l'Anthropocène dont je fais partie de la promo 4 pas encore diplômée,
mais bientôt. Et enfin tu m'as accompagné aussi dans le travail avec Virage Énergie sur les
représentations de la sobriété qui m'a permis de poser les bases et de trouver notamment le titre
de ce podcast enquêtes de sobriété. C'est aussi dans ces échanges là que ça a émergé. Donc
je suis ravi de t'accueillir ici pour prolonger et partager nos échanges avec les auditeurs
et auditrices de ce podcast. Ravi d'être là et de faire partie de ce beau projet que tu as mené
et qui j'imagine aura une longue vie en tout cas il est appelé je pense à avoir de belles suites.
En préambule à notre échange comme dans le générique du podcast je pose l'hypothèse que
l'attrait pour la démesure affecte avant tout les personnes privilégiées. Quelles sont tes privilèges
que tu as envie de partager et qui selon toi filtrent des formes renforcent ton regard et ton
propos voire te créent des angles morts ? Beaucoup de privilèges si on prend les choses sous cet
angle je suis un homme, je suis blanc, je suis hétérosexuel. On pourrait mettre des variations
pour tous ces termes là parce que c'est une catégorie très discrète mais pas forcément rentré
dans le détail de chacune et catégorie. Peut-être le privilège que j'ai envie de mettre en avant
ici qu'un privilège réel et en même temps un tout petit peu paradoxal c'est la position
d'enseignants-chercheurs qui laissent quand même un rapport au temps assez privilégié qui fait qu'on
est amené aussi à assez souvent se déplacer en étant pris en charge donc c'est pas en tout cas
idéalement un travail où on est à l'usine, à l'établi ou alors au bureau tout le temps même si ça
tente de plus en plus beaucoup de profession à se normaliser et que ça devient une espèce d'idéal
malgré tout mais c'est pas comme ça qu'on se représente le métier d'enseignants-chercheurs donc
c'est un métier assez privilégié je pense du point de vue effectivement de l'usage du temps et en
même temps on le voit avec beaucoup de souffrance de la part des enseignants-chercheurs des enseignants
de chercheuses parce que justement cette idée là dans la réalité en fait il est bien souvent
menacé ou alors parfois même inexistant rangé par l'administratif rangé par d'autres tâches qui
viennent empêcher effectivement d'exercer ce métier tel qu'on imagerait évidemment entre les titulaires
et les vacataires ce ne sont pas toutes les mêmes conditions de travail le même rapport au temps même
rapport aux salariats et donc il peut y avoir aussi un désajustement je dirais entre la position
de chercheurs telle qu'on se l'imagine par défaut tel qu'on l'a rêvé et puis la réalité du métier
et ça peut amener parfois au contraire à s'arquebouter d'autant plus sur ce qui reste de ses
privilèges au moment même où il faudrait peut-être justement repenser beaucoup plus radicalement les
choses et notamment les évolutions de la recherche donc ça peut être aussi une manière d'inviter à
repolitiser sa position dans le champ il y a réexaminer les privilèges ceux qui sont légitimes ceux
qui sont parfois induits par l'entrée en détail mais aussi des abus dans ces mondes là mais comme
dans toutes les professions donc j'insisterai peut-être là dessus parce que c'est quelque chose qui me
frappe cette liberté quand même de se déplacer d'être invitée de faire des rencontres c'est
quand même un usage de son temps professionnel qui à fois un usage je pense légitime et très
utile et enrichissant mais toutes les professions n'ont pas cette latitude là voilà cette possibilité
là il faut quand même le poser le reconnaître comme un vrai privilège par rapport à la situation
d'autres travailleurs et d'autres travailleurs merci pour cette auto analyse et réflexion sur
ces privilèges moi j'entame cette réflexion pour creuser un petit peu plus cette question de
privilège je me suis rendu compte il n'y a pas très longtemps que privilège c'était beaucoup
aussi en opposition à privation donc je trouve ça très intéressant sur le sujet de la sobriété
justement de ce rapport donc du droit privé ou à la privation donc à l'interdiction à l'accès
c'est une réflexion qui va cheminer je pense avec cette question j'espère qu'il reviendra souvent
avec mes prochains invités j'aimerais continuer notre échange sur la question de la redirection
écologique qui est vraiment au coeur de notre échange aujourd'hui nous avons déjà parlé de la
redirection écologique cherge auditeur auditrice avec natan ben kemoun dans l'épisode 3 et justement
je l'avais évoqué dans cet épisode on avait parlé j'avais dit faudra qu'on revienne dessus et
qu'on creuse donc c'est le moment là maintenant on va creuser ensemble cette question de la redirection
écologique et c'est peut-être une définition qu'on te demande souvent à c'est quoi la redirection
écologique bon pour éviter ça et puis c'est bien ça me fait un exercice de mise en pratique tu vois
après un an de travail voilà je vais me risquer d'essayer à te proposer des axiomes de la redirection
alors non pas des axiomes au sens mathématique improbable indémontrable parce que je pense qu'au
contraire vos livres cherchent à le démontrer et à prouver à les amener ces axiomes mais plutôt
axiomes au sens au point de départ quoi et aussi de différenciant de la redirection écologique par
rapport à d'autres sujets donc je vais te proposer les trois premiers et après on les complétera
d'ailleurs au fur et à mesure de notre échange après ces trois premiers ben je veux bien que tu
me dise ce que t'en penses comment tu les nuancerais comment tu les préciserais si nécessaire avec
plaisir donc le premier axiom de la redirection écologique ce serait nos héritages sociotechniques
nous oblige en ce sens que on hérite de systèmes techniques d'infrastructures d'organisation
sociale et il nous faut prendre la responsabilité de ces héritages et notamment en construisant des
stratégies de redirection en partant de l'existent en assumant ces héritages en première axiom
deuxième axiom il est direct nous ne pourrons pas tout maintenir tout ne pourra pas être maintenu dans
ces infrastructures dans de la quantité de ces héritages là il faudra faire des arbitrages des
fermetures des renoncements plein de mots différents peut-être on apportera la nuance et en
cela la redirection se distingue de la transition ou de la croissance verte en posant d'emblée le
sujet du démantèlement au centre des stratégies à opérer on s'en paraît être un axiom assez
central et enfin troisième axiom les personnes sont expertes de leur attachement c'est à dire ces
arbitrages les arbitrages dont on vient de parler doivent impliquer les collectifs affectés et
concernés pour les réaliser dans de bonnes conditions les conditions que tu définis dans
ton livre comme étant démocratique anticipé non brutal ces arbitrages ne peuvent pas être
laissé aux seules décisions technocratiques ou au marché financier il ya une proposition une
invitation à la redirection écologique de se les approprier démocratiquement que penses-tu de ces
trois axiomes je trouve c'est un résumé structuré qui est tout à fait bon je traduis ça effectivement
en trois axiomes autour de la notion d'héritage de fermeture et d'attachement il me semble
effectivement les notions clés peut-être à opposer effectivement d'autres perspectives donc si
je reprends les termes que tu as posé la notion d'héritage elle effectivement nous oblige d'une
certaine manière à prendre acte de la situation où nous sommes alors évidemment cette situation
va être très variable de façon générale mais on va dire où se trouve l'humanité et un temps
t maintenant à travers voilà une histoire un développement technique industriel ces conséquences
aussi sur les milieux etc etc et cette notion d'héritage d'une certaine manière elle vient je ne
sais pas si c'est en opposition mais en tout cas nuancer des perspectives qui viseraient finalement
à dire bon bah tous ces éléments là dont on vient de parler la technique l'industrie parfois la
modernité un espèce de franc ontologique à l'encontre duquel il faudra aller je pense qu'on
aura l'occasion d'en reparler la civilisation même ou autres sont la cause de nos problèmes et donc
il faut en sortir ce qui me semble plus une position intellectuelle qu'on peut prendre après ce
que c'est une position qui au regard des contraintes matériel fait sens je ne sais pas est ce qu'il
n'y a pas une sorte d'idéalisme ici de la pensée c'est à dire bah voilà on a un problème il s'appelle
x on supprime x on n'a plus de problème je pense que les choses plus complexes que ça et que les
conditions matérielles aussi qui permettent d'envisager ces solutions là ne sont pas forcément
réunis alors faut pas se limiter seulement aux conditions matérielles qui sont une autre l'utopie
la critique etc évidemment toute leur place néanmoins il faut quand même ancrer nos stratégies et
nos programmes de recherche et d'action dans des conditions matérielles pour comprendre effectivement
quelles sont les options à notre disposition pour agir et être efficace donc là effectivement il
y a quelque chose d'assez spécifique qui déplace aussi le geste critique c'était vraiment un élément
fort au départ de la réflexion qu'on a mené avec digole en diva sur cette question avant de parler
de redirection écologique sur un projet qu'on a monté tous les deux que s'appelait closing words
de dire voilà même la critique souvent cherche à abolir ce qu'elle critique alors toute critique
n'est pas dans cette perspective là mais une partie de la critique qui est quand même dans
cette perspective là pour autant il y a toute une industrie la critique du capitalisme qui n'est pas
du tout abolit le capitalisme qui est quand même loin de la coupleèvre entre la critique et puis
sa déclinaison on va dire concrète matériel et stratégie qu'on peut mener et il y a peut-être
un enjeu justement à prendre acte du fait que même si on n'en est pas forcément satisfait
on hérite de cette situation vraiment diagnostiquer ça et puis essayer de voir
quelles sont les options à notre disposition évidemment un élément qui peut illustrer
simplement c'est la question du nucléaire ou là ceux qui sont pro ou anti nucléaire non
tous les cas ont un problème avec ce qui a été réalisé jusqu'à maintenant avec les
centrales existantes avec les déchets avec toutes ces choses là et quelle que soit la position
critique ou pas critique que l'on adopte on a un souci dans les deux cas qui peut transcender les
perspectives idéologiques le deuxième point que tu as mentionné c'est la question effectivement
de la fermeture du renoncement du démantèlement c'est peut-être une nuance par rapport à étages
et fermetures dans mon livre suivant politique et renoncement il y a moins une opposition à la
question de la transition qui maintenant est quand même une idée assez fortement portée que voilà
c'est l'idée que transition piège à con quoi que la transition finalement ne mène nulle pas qui
a pas de transition de toute manière etc etc qui est une idée effectivement tentante parce que
oui les choses ne vont pas assez vite pas assez loin faudrait des transformations évidemment
radicales en profondeur au-delà de cet impératif je suis pas certain qu'il y a un consensus absolu
derrière concernant la direction exacte où on va mais en tout cas la tentation effectivement c'est
de dire que finalement cette histoire de transition n'a aucun sens que c'est un part avant et que
donc il faut l'abandonner ce qui n'est pas ta position aujourd'hui et ça n'a peut-être jamais été
mais c'est ça c'est là où tu nuances que ce que je disais tout à l'heure c'est ça j'ai pas d'hostilité
disons à la transition mais par contre effectivement la redirection écologique apporte quelque chose
d'autre par rapport à la transition c'est à dire qu'il y a plutôt cette idée qu'une vraie
transition est nécessaire mais pas du tout suffisante et qu'au-delà de ça il faut aller
encore plus loin et effectivement se poser des questions liées à des arrêts des fermetures
des renoncements et qui peut-être même sont la condition d'une bonne transition et qui ne
soit pas une transition qui fonctionne sur un principe de business azule en sachant par ailleurs
que derrière le mot transition il y a beaucoup de choses et que donc on va trouver aussi bien des
programmes intéressants légitimes etc que d'autres qui le sont moins qui vont plutôt du côté du
grain washing ce qui ne veut pas dire qu'on peut condamner d'un coup d'un seul l'ensemble des
initiatives qui se mènent sous le dénominatif de transition et puis après il y a une question
effectivement que pose la transition énergétique comme le rappelle souvent le jackon le régime
politique dans lequel on mène une transition énergétique peut être aussi bien le capitalisme
vert ou pas vert d'ailleurs le carbo fascisme autre qu un régime décroissant en capitalisme
carbo fascisme qui pense pas qu'il fera de transition par contre un capitalisme vert peut
essayer de faire une transition plus ou moins un régime politique pour économie qu'alors du côté
de la décroissance devra aussi faire une transition donc ça reste un élément nécessaire et après
tout l'enjeu c'est dans quelle économie politique il va s'inscrire c'est ça qui va lui donner sa
direction donc c'est pour ça qu'on ne peut pas forcément l'écarter mais pour vraiment lui donner
un sens précis en faire une perspective viable effectivement l'associer une perspective de
fermeture donc une perspective de redirection me semble nécessaire donc c'est moi une opposition
entre eux et deux qu'un complément nécessaire qu'il faut à mon avis apporter et puis le dernier point
effectivement que tu as évoqué qui est central dans l'approche qui est la nôtre concerne la
question des attachements c'est vrai que c'est une notion héritée ici en particulier du travail
d'Antoine Hennion alors c'est pas le seul qui a travaillé sur la question des attachements du côté
de la sociologie de ce qu'on appelle notamment la sociologie des attachements alors il y a toute une
psychologie des attachements qui s'est développée mais c'est pas là que la redirection écologique
a été cherché ces enseignements c'est plutôt du côté de la sociologie des attachements développée
notamment par Bruno Latour, Michel Calon et en particulier Antoine Hennion je dirais que c'est
lui qui a je pense le plus accès son programme de recherche autour de cette notion d'attachement
et qui est important ici pour comprendre si on veut induire des ruptures des renoncements
des fermetures etc etc forcément et si on prend cette idée au sérieux pour lui donner une
application concrète et matérielle je pense que c'est un point important et en même temps on
fait une idée légitime j'allais dire quasiment mainstream c'est pas une idée d'avant-garde
qui va rester une idée radicale mais une idée totalement légitime et sur laquelle on se met à
travailler qui est porté par des institutions ou ça après lesquelles d'institution ça effectivement
là on peut pas être tous d'accord mais je pense que c'est effectivement important de mettre au
coeur cette question des attachements de réfléchir à quoi les personnes les collectifs qui sont
attachés à des activités à des infrastructures parfois même à des territoires parce qu'il y a
des territoires aussi qui vont devoir être abandonnés demain voilà comment on prend en compte cette
notion d'attachement au pluriel comment on travaille cette question effectivement ça
distingue aussi la redéaction d'autres perspectives qui font écho excusez tout à l'heure à propos de
la notion d'héritage qui veulent être en rupture vraiment vraiment direct qui veulent être elles
ne sont pas toujours dans l'effet parfois c'est un peu d'idéaliste mais qui théorise parfois
récemment j'ai vu ça l'arrachement contre l'attachement en disant si on veut être vraiment
radicale en fait faut pas parler d'attachement parce qu'on parle de ce à quoi les gens sont
attachés qui pas toujours vu comme étant légitime par les collectifs on va dire très radicaux et
ce qui est légitime de penser c'est l'arrachement l'arrachement une réalité qui nous fallait dans
le mur et donc prendre en compte cette notion d'attachement finalement ça n'est pas forcément
le plus légitime en tout cas ça devrait pas être mis en avant et je pense du côté de la redéaction
c'est plutôt l'inverse c'est plutôt le fait de dire voilà il y a ces attachements on considère
que sont légitimes qui sont pas légitimes on en hérite aussi c'est une situation de départ
y compris politiquement ça va induire les conséquences très importantes sur la manière
d'aborder ces enjeux et donc comment on travaille cette question des attachements et effectivement
une perspective peut-être moins avant-gardiste et plus démocratique la John Dewey qui inspire
aussi le pragmatisme Antoine Hennion c'est un auteur pragmatiste également peut ici être utile et
notamment parce qu'effectivement tu l'indiquais c'est aussi un axiome les personnes concernées sont
les experts et les experts de leurs propres attachements avec des limites parce que on est
aussi parfois aveugle sur ce à quoi on est attaché mais en tout cas ce travail là ne peut pas se
faire sans elle et ce qui veut dire aussi effectivement que la redirection écologique a un fondement je
pense éminemment démocratique toute la question est tendre à savoir ce qu'on entend par démocratie
et voilà je pense qu'on en reparlera mais ici on va puiser du côté de John Dewey de la question
de l'enquête pour finalement définir ce que peut être une activité voire une vie démocratique et
enquêter sur ces attachements au moment même où on fait face à des ruptures qui obligent à les
repenser qui oblige à se projeter dans d'autres modes de vie de main ça me semble effectivement
une question à la fois légitime et absolument cruciale et cette question de l'enquête sur
ces attachements là ça fait vraiment l'écho avec ce podcast avec l'enquête sur la sobriété donc
on est en plein dedans et en particulier ce troisième axiome que je citais donc les personnes
sont experts de l'attachement tu l'as davantage travaillé dans ton deuxième livre politique le
renoncement la question je me pose parce que votre premier livre date de 2021 les réflexions
préliminaires de closing worlds etc date encore d'avant je sais plus trop les dates mais 2017
à peu près voire même peut qu'on remonte à 2015 si on veut ok donc tout ça c'est en gestation
ça a pris différentes formes le livre le master etc en fait la question que j'ai envie de te poser
là en septembre 2024 c'est par rapport à ce que vous racontiez ce que vous disiez ou comment
vous avez construit tout ça qu'est ce qui a changé sur quoi les subtilités et les nuances
qui sont venues se glisser sur ta conception de la redirection écologique écoute c'est une bonne
question c'est une vaste question je ne vais pas pouvoir tout indiquer mais effectivement entre
l'écriture des rétages et fermeture et puis celle de poétiser le renoncement j'ai revu ma perception
de la transition parce que j'aurais volontiers dit comme d'autres que la transition finalement c'était
vraiment insuffisant voire éventuellement un piège genre je pense que j'aurais dit ça au moment
des rétages et fermeture mais dans les années qui précédaient je pense que j'aurais pu tenir un
discours approchant je pense que les données aussi ont changé les données concernant la transition
énergétique donc finalement c'est un peu ton enquête qui a continué sur la question de la transition
et où tu as nuancé modéré les convictions d'une certaine époque oui c'est ça on peut me faire des
reproches on peut ne pas être d'accord avec moi avec ce que je raconte dans mes travaux etc
par contre il ya une chose je pense qui est vrai c'est que j'essaie de pas produire des contenus
dogmatiques au sens où j'aurais pris une position et puis finalement le fait d'avoir pris cette
position pendant quelques temps quelques années voir plus parfois parce qu'on vieillit je ne suis
pas encore des décennies mais bientôt ça arrivera fait qu'à un moment donné on peut être tellement
attaché d'une certaine manière à ce qu'on a raconté parce que on revient sur la question des
privilèges on peut être invité à raconter la même chose partout devant les médias etc
qu'on devient sa propre caricature et que finalement une personne qui a un discours très orienté sur
un sujet donné peut être la dernière personne finalement bien placée pour donner son avis sur
ce sujet en question parce que d'une certaine manière elle s'oblige elle-même à dire quelque
chose elle s'oblige elle-même finalement à performer quelque chose elle ne pas sortir des
rails qu'elle a posé auquel cas c'est toute la crédibilité acquise qui va disparaître il
y a tout un ensemble de carrières d'ailleurs de chercheurs de chercheuses qui sont battus
à ce fait de répéter de manière monomagnique une idée et puis finalement d'en tirer les
bénéfices on va dire ça comme ça il y a même quasiment une rente à faire ça et moi j'ai un
tempérament beaucoup plus inquiet par rapport à ce que je raconte je me demande toujours si ce que
je dis est vrai est juste si ça évolue dans le temps peut-être que ça ne l'est pas c'est sans
doute beaucoup plus compliqué parce que le monde excède heureusement nos théorisations et donc je suis
peut-être volontiers pour cette raison amené à essayer de réviser ce que je pourrais raconter
alors forcément des auto-critiques soviétiques c'est pas ça mais à apporter de la nuance qui
peut ressembler insensible au premier abord mais qui en fait est relativement sensible donc oui sur
la transition par exemple c'est le monde qui a changé la transition est devenue quelque chose de
plus crédible encore une fois qui a ses limites qui n'est pas suffisante qui aura peut-être pas assez
loin ou assez vite mais qui dans tous les cas même ça va pas assez loin assez vite reste nécessaire
d'autant plus que l'alternative qui est de rien faire n'est pas suffisante et fait vraisemblablement
le bonheur des lobbies des énergies fossiles faut quand même aussi s'en rendre compte donc ça
c'est un premier point j'étais amené à nuancer les choses parce que les données avaient changé ça
peut sembler idiot mais il y a des projets de renoncements par exemple en disant un projet sur
lequel des collectivités travaillaient mal et données ont changé donc ce qui était possible de
faire il y a dix ans en fait n'est plus possible dix ans plus tard et c'est pas la faute de qui que
ce soit c'est juste que on a des études scientifiques plus précises mieux documentées on se rend compte
que là on pensait pas être les pieds dans l'eau il y a dix ans ben en fait on sera les pieds dans
l'eau dix ans plus tard voilà à la fois parce que les perspectives changent mais aussi parce que
nos données changent également parce qu'on sait mieux travailler c'est pas scandaleux de ce point
de vue là aussi de prendre en compte ces évolutions qui sont les évolutions tout simplement du réel
ça c'est je dirais un premier point mais qui n'est pas négligeable parce que j'ai l'impression
qu'aujourd'hui dans beaucoup de milieux c'est chic et radical ou radical chic de dire par exemple
que la transition est impossible ce qui pour moi est plutôt un warning quand j'entends ça de gens
qui ont éventuellement eu un livre écouté une conférence et qui adopte cette idée alors qu'en
fait oui c'est une idée qu'on peut évoquer mais qui se discute qui est évidemment discutable et je
pense qu'à l'effet d'une incrugueur on découvre un domaine on est plein d'assurance alors que plus
on enquête justement sur ce domaine moi on a d'assurance qui veut pas dire qu'on n'a aucune
position on continue à adopter une position mais pas avec la foi du charbonnier quoi et ouvert
aussi à la critique à la révision etc pour peu évidemment qu'on n'est pas une rente comme
j'indiquais tout à l'heure ce qu'un phénomène dans ma vie beaucoup plus répandu par ailleurs que
ça donc chacun chacune imaginera qui ça peut évoquer etc voilà on laisse à chacun décider ça
il y a beaucoup d'exemples donc ça c'est le perso en particulier je pense un phénomène en
recherche qui est là je m'en répandu ça c'est le premier point l'autre point je pense qui doit
être mentionné dans poétiser le renoncement c'est le timing de publication du livre en fait
les étages d'affirmature étaient publiés en mai 2021 si je ne dis pas de bêtises et donc on était
déjà en plein confinement ou les confinements venus s'arrêter enfin voilà en tout cas on était
en pleine pandémie peut-être qu'on l'est toujours d'ailleurs mais ça a été invisibilisé depuis
c'est le fameux vivre avec vivre avec le virus voilà je suis parti de la secte des gens qui regardent
un petit peu ce qui se passe et qui se disent que tout n'est pas terminé que voilà il y a encore des
suites à tout ça et donc dans politiser le renoncement j'ai beaucoup plus pris en compte je
dirais les conséquences pragmatiques de nos discours me disant que un discours sur la fermeture
pouvait s'il n'était pas maîtrisé je pense qu'on a un discours relativement maîtrisé mais il
faut quand même y travailler parce que la réception l'usage qui est fait des travaux des concepts
n'est pas du tout une question qu'on peut abandonner je pense que c'est aussi de notre
responsabilité alors là il y a côté presque l'isabelle stanger ça on est un peu responsable de
ce qu'on raconte et des effets que ça en tout cas on doit le travailler et donc il m'a semblé
qu'il pouvait avoir une lecture d'héritage et fermeture toutes ces questions que ce soit une
lecture validiste une lecture qui explique il faut tout fermer toutes les technologies toutes les
infrastructures tout ça c'était une erreur la modernité c'était une erreur faut revenir dessus
et puis en fait des personnes qui sont déjà en situation de fragilité pour des raisons de santé
pour des raisons diverses et variées risque de pâtir en fait encore plus de ces discours
qui peuvent se transformer assez facilement au discours eugéniste ou autre et ce qu'on a vu
en l'occurrence au moment de la Covid ce qu'on voit encore il y a encore quelques semaines
à la Damasio disait j'ai une vision ni de chaîne de la pandémie parce qu'il y a vraiment une boîte
noire on peut pas rentrer en détail ici mais je pense c'est vraiment la catacle de dire quelque
chose comme ça et donc comment on fait pour que ces discours autour de ces fermetures nécessaires
n'est pas justement ces effets induits qui tirent du côté de l'eugénisme du validisme
etc etc et on pourra multiplier évidemment les dimensions les exemples et c'est pour ça
que j'ai essayé d'affronter cette question dans le livre on voit qu'il y a eu une vraie
tentation alors c'est pas nouveau du côté de l'écologie c'est pas forcément l'écologie en
général mais il peut y avoir une tentation malthusienne peut avoir une tentation validiste
il peut avoir une tentation voilà et faire une écologie finalement de corsins qui retrouve la
nature et je vais peut-être faire une petite aparté sur malthusienne et validisme pour essayer
d'expliquer en quelques mots bien sûr bien sûr alors le validisme effectivement c'est je dirais
la discrimination contre les personnes qui sont en situation de handicap et le fait d'élever au
rang de normes absolues la norme de fait d'être valide avec toutes ces essais qui ne sont pas dans
cette norme là empathie se voir sont vus comme des personnes surnuméraires qui à un moment donné
où un autre peuvent être être liquidés ce qui se passait au moment de la pandémie il y a eu du
tri entre les patients et personnes qui étaient en situation de handicap avec déjà une pathologie
ou d'un certain âge ont été vus comme celle qu'il fallait effectivement prioriser pour libérer
des lits et puis débrancher voir que c'est une réalité donc éminemment tangible c'est pour ça
quand on parle de la loi autour de la fin de vie récemment il y a beaucoup de collectifs qui
lutte contre le validisme qui se sont élevés contre cette loi parce que voyant que finalement
ces personnes-là pouvaient être ciblées qu'au nom de libre choix de la fin de vie en fait on
pouvait finalement à moindre rire encore plus leurs droits à exister et donc fragiliser un peu
plus des existences qui sont déjà fragiles au regard des institutions au regard du mode de
fonctionnement du monde tel qu'il est tel qu'il est aujourd'hui voilà ça c'est le premier point
et malthusienne effectivement alors qui renvoie à malthus donc cet auteur cette ecclésiastique
britannique du 18e siècle il y a tout un débat interprétatif quand on regarde les travaux de
recherche concernant son œuvre mais le malthusianisme aujourd'hui tient que la population est un
problème au regard de la disponibilité des ressources et que donc un des facteurs pour
retrouver des conditions d'existence viable à l'échelle de l'humanité effectivement c'est de jouer
sur le paramètre de la population c'est donc c'est de limiter la population de réduire la
population voire de s'attaquer aux populations qui sont jugées comme étant surnuméraire et selon
les époques et moments ça peut être tantôt les pauvres les classes dangereuses les personnes
qui ne sont pas valides situation de handicap ou autre en tout cas voilà des viandes des viandes par
rapport à une norme donnée et il y a toujours cette tentation quand on pose les questions environnementale
que je ne partage pas mais qui est quand même à l'arrière-plan de pas mal de discours quand on parle
de capacité de charge d'un territoire quand on parle de tout ça de faire effectivement de la
population le facteur numéro un de pression finalement sur les écosystèmes qui faudraient
donc réduire la pression et donc réduire la population ce qui est intéressant parce que
ça a été très fort je pense dans les années 60 70 il y a beaucoup de livres à ce moment là qui
en parlait aujourd'hui avec des controverses assez nombreuses mais on voit qu'on a plutôt un
mouvement notamment la part de milliardaires Elon Musk étant un exemple mais le patron de
telegram qui a été récemment arrêté en France j'ai vu passer un article qui disait qu'il revendiquait
la paternité de 100 enfants j'ai vu passer ça donc avec cette idée qu'il faut re peupler très
rapidement alors souvent c'est dans les perspectives aussi assez racistes il y a une espèce de
grand emplacement je pense que c'est Musk il y a un peu ça un grand emplacement donc il faut que
les blancs prolifèrent pour se défendre etc mais plus largement cette idée que finalement la
population au lieu d'atteindre des niveaux qui vont exploser à l'avenir aujourd'hui va tendre à
atteindre assez rapidement un plateau et donc à diminuer on parle du fait que la chine va perdre
d'ici quelques décennies les deux tiers de sa population ce qui est absolument considérable et
donc cette idée d'une population humaine qui va exploser à l'échelle du globe aujourd'hui je
pense qu'on en est revenu mais c'est très difficile évidemment d'aller sur des projections mais
il y a quand même des tendances et ces tendances vont quand même à un plateau et une diminution plus ou
moins rapide parfois assez rapide avec derrière des problèmes sociaux parce que quand vous perdez les
deux tiers de votre population en quelques décennies votre système de retraite d'assurance sociale
etc etc on va revenir sur la question de la réforme de retraite ouais c'est assez compliqué mais en
tout cas ça pose énormément de questions mais on est dans des perspectives qui sont effectivement
différentes des perspectives de cette explosion de la population qui pouvait derrière déboucher
sur une vision malthusienne des solutions à adopter qui a été quand même une certaine
tentation au début de la deuxième moitié du 20e siècle pas mal de théoriciens et à mon sens il
faut combattre donc ça je comprends c'est l'évolution de ton enquête de tes idées du regard critique
des positions ou des choses défendues comment ça peut bouger et on va continuer un petit peu ce
cheminement mais faire une petite aparté sur tous ces travaux finalement toutes ces enquêtes
qu'est-ce qu'elles ont eu comme effet sur toi sur ta vie donc c'est le moment plus question personnelle
on sort un peu du champ théorique etc mais qu'est-ce que tout ce travail d'enquête de réflexion et
je comprends qu'il est encore en cours que cette enquête est encore en cours pour toi qu'est-ce
que ça a changé chez toi dans tes pratiques dans tes relations dans tes implications dans tes lieux
de vie dans tes modes de vie peut-être je ne sais pas mais qu'est-ce que ça a produit chez toi c'est
une bonne question je pense que ça m'a obligé après un temps d'élaboration plus collectif de la
redirection écologique et il y a un certain nombre de projets passés ça m'a amené à me recentrer
sur un programme de recherche peut-être plus personnel en allant de paire avec ce dont on parlait
tout à l'heure c'est-à-dire les confinements qui ont été des moments d'isolation forcées pour
tout un ensemble de personnes qui s'en est suivi pour ma part d'un déménagement recentrement on va
dire géographique et tout ça était de paire avec le fait de peut-être développer un programme de
recherche aujourd'hui je parle plus en mon nom personnel qu'au nom d'un collectif qui serait le
collectif de la redirection écologique ou un auteur pluriel mais plutôt à déconstruire aussi un
certain héritage latourien qui a été très important pour moi qu'il l'est toujours mais il y avait du
quel alors j'étais déjà critique un particulier dans l'étage et fermeture parce que notamment le
chapitre que je signais était entre autres un dialogue avec le travail de Bruniatou et un dialogue
sur un mode constructif je dirais et critique peut-être que la part critique c'est accentué depuis
je trouve ça très bien parce que la redirection écologique ça n'est pas un dogme on est libre je
pense à partir un certain d'action que tu as mentionné tout à l'heure d'aller dans des directions qui
sont des directions différentes et finalement on est d'autant plus libre que d'autres le sont
également et qu'aujourd'hui la redirection c'est pas simplement un ensemble d'énoncés théoriques
qui sont portés par quelques personnes mais c'est aussi tout un écosystème d'étudiants et
d'étudiantes bientôt futur ex dont tu fais partie mais également de commanditaires de gens qui sont
dans des collectivités ou ailleurs qui ont travaillé avec nous avec d'autres personnes au nom de la
redirection écologique qui s'empare aussi de ce cadre qu'on a posé qui a vocation à ce qu'on s'en
a pas alors parfois ça va être de manière fidèle parfois moins donc il faut évidemment être à la
fois attentif à ça et en même temps comprendre que on peut pas régir ce cadre là de manière
dogmatique sinon ça veut dire que on en reste au niveau du discours et pas de l'appropriation donc
ça m'a permis d'aller peut-être explorer d'autres pistes que je n'aurais pas forcément exploré en
collectif et j'en suis aussi très content parce que je me sens encore plus c'est un travail en
cours mais en adéquation avec le discours que je porte du fait d'aller explorer des choses que
j'aurais pas forcément exploré en collectif mais que je me permets je m'autorise à explorer
un titre individuel
je me rends compte qu'on échange principalement sur la redirection écologique et on n'a quasiment pas
parlé encore de sobriété ce qui m'intéresse finalement dans notre échange c'est que
le terme de sobriété dans ton deuxième livre tu y consacres un chapitre on va y revenir sur
ma question d'après mais globalement ça s'appelle politiser le renoncement c'est le titre de ton
second livre et c'est un terme qui est aussi utilisé chez d'autres auteurs ou bien par d'autres
institutions comme étant quasiment un équivalent ou même une précision je pense en particulier à
bruno vilalba qui utilise ce terme de renoncement dans son livre pour spécifier un petit peu la sobriété
dont il parle et pour la distinguer d'une question d'efficacité donc de la rapprocher de cette
question de renoncement il me semble en ayant lu vos travaux et suivi tous les cours etc que
pour le coup dans la redirection écologique renoncement et sobriété peuvent peut-être se
couper mais sont aussi assez différents est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur voilà ta
conception aujourd'hui de renoncement et sobriété oui tout à fait effectivement c'est une bonne
question parce que la place exacte de la sobriété est pas évidente mais je pense qu'elle doit se penser
en lien avec le renoncement et aussi en lien avec ce que tu expliques tout à l'heure c'est à dire
l'efficacité j'ai l'habitude de dire souvent que plutôt que de d'y voir trois dimensions qui sont
des dimensions à opposer on va choisir finalement entre l'efficacité c'est à dire peut-être le tout
technologie ce qu'on appelle parfois le technosolutionnisme ou la sobriété on va dire le
changement de mode de vie parce que souvent elle va être vue du côté des comportements de la
consommation etc même si on peut en fait élargir ça à la production on pourrait poser la question
de la sobriété du point de vue de la production ce qui élargirait quand même aussi les réflexions
ce serait un chapitre à part et puis enfin il y aurait le renoncement en précisant que le renoncement
en question peut-être que je le porte dans le politique de renoncement n'est pas un renoncement
moral c'est un point aussi important parce que le terme est très chargé donc on pourrait y voir
un élément moral il faut renoncer il y a des choses qui sont pas bonnes intrinsèquement qui nous
sont amenés dans le mur oui pour rejoindre la tempérance justement qu'on peut retrouver dans
les discours de sobriété on pourrait faire le lien d'ailleurs entre les deux sur un renoncement
moral qui irait effectivement du côté de la sobriété moi j'ai tendance à considérer que
ces trois termes ont leur place d'ailleurs quand on regarde les rapports du GIEC Louis
Jackon grand spécialiste de leur décryptage intervient dans notre formation donc je m'appuie
aussi sur son décryptage bien plus compétent que moi sur ces questions là montre bien que dans
les trajectoires que pose le GIEC pour demain à partir des littératures scientifiques il n'y a pas
de trajectoires viables où on n'associe pas sobriété et efficacité on est obligé de jouer sur
deux paramètres on ne peut pas jouer sur un seul les deux paramètres la difficulté étant d'avoir
une efficacité qui soit vraiment efficace et ça je dirais ça suppose la sobriété ça suppose
d'encadrer l'efficacité pour éviter les effets rebonds donc pour le traduire pour les personnes
qui ne sont pas familières de ces de ces questions là l'effet rebond c'est la tendance lorsqu'on
améliore une technologie et qu'on l'améliore au plan technique et à la fois évidemment au plan
économique c'est à dire quand elle a capacité à la produire à un coût moins important elle a
diffusé etc etc finalement à disséminer cette technologie un petit peu partout l'exemple type
de technologie qui est devenu très efficace au cours du 20e siècle c'est le numérique puisque
pour une même quantité d'énergie aujourd'hui et hier où il y a quelques décennies on fait beaucoup
plus de calcul aujourd'hui que hier voilà et par ailleurs en fait ben on pourrait dire si on
garde la même quantité de calcul on fait une économie d'énergie mais en fait c'est pas ce
qui se passe puisque c'est tellement facile pratique etc de mettre du numérique partout qu'on
en met partout et en fait les gains d'efficacité sont perdues du fait de la diffusion extrême de
ces technologies ça c'est l'effet rebond paradoxe de jevons etc et donc ça suppose pour éviter
cet effet rebond qu'on encadre en fait la diffusion l'usage etc de cette technologie et donc on
met en place des réglementations et donc d'une certaine manière une forme de sobriété par la
réglementation donc si on veut garder les gains d'efficacité et donc faire en sorte que l'efficacité
soit efficace il faut de la sobriété de ce point de vue là sobriété c'est un bon complément à la
fois une sobriété en termes de production et de consommation évidemment on ne va pas jouer sur
l'un ou l'autre des facteurs il faut jouer sur les deux sinon ça n'a pas de sens donc ça veut
dire aussi qu'on ne se limite pas à la question des comportements ou à une question de vertu au sens
où voilà être sop c'est être plus vertueux que son voisin surtout je pense qu'il faut éviter que la
sobriété ça devienne ça sinon on va être complètement perdant en termes d'écologie et
d'autre part il faut éviter aussi que la sobriété soit absolument inefficace ça c'est ce que
Philippe Gauthier intervient aussi dans notre formation je parais du neuf recollectif on le voit
parce qu'il y a une pensée à plusieurs appelle un effet de recul c'est à dire le fait de dire
on va basculer vers des technologies vues comme des technologies sobres parce que l'OTEC etc etc
on va s'éloigner des ITEC des hautes technologies pour aller vers des bases technologies sauf que
dans un certain nombre de cas ces bases technologies s'ils ne se préoccupent absolument plus de la
question de l'efficacité peuvent être à ce point inefficace que le service rendu il est certes
relativement sobre en tout cas en termes de coût mais il est tellement dégradé qu'en fait c'est
problématique parce que si on essaie de retrouver le service passé avec ces technologies là on
va les multiplier et comme son technologie très inefficace bien la ponction sur les milieux
va être d'autant plus importante l'exemple qui peut illustrer très simplement c'est l'exemple que
j'aime bien celui du poil ou de la cheminée si on utilise une cheminée pour se chauffer ben
imaginons qu'on est un jardin à côté de soi on va vite couper tous les arbres de son jardin pour
se chauffer et détruire complètement les milieux environnants parce que c'est une technologie
extrêmement inefficace avec le coût pour se chauffer il est extrêmement élevé donc le rapport
entre l'entrée d'énergie le poids sur les milieux et l'énergie utile à la fin là où le fait de
basculer par exemple sur un poil on va vers une technologie qui est nettement plus efficace et
donc il va permettre quand même de beaucoup moins ponctionner les milieux donc il faut arriver à
avoir de technologie que soit la technologie sobre basse ou haute en tout cas qui soit sobre mais
qui soit pas complètement une efficace donc comment on arrive à associer sobriété efficacité en
tout cas je pense c'est un vrai enjeu et d'ailleurs il y a des gens qui travaillent sur
ces enjeux de développer des lotèques des basse technologie entre guillemets et qui se soucient
de développer des lotèques qui ne soient pas complètement une efficace mais qui au contraire
maintiennent le plus possible une forme de efficacité notamment parce que à 8 milliards si on
bascule sur la technologie absolument inefficace la ponction sur les milieux va être très importante
c'est un peu le paradoxe c'est que nos technologies actuelles ne sont certainement pas viable ça c'est
sûr mais la simple bascule sur les technologies sont les technologies un peu idéalisées du
passé etc à 8 milliards ne sera pas viable non plus puisque elle était à peine viable en fait à
l'époque où ces technologies ont été développées heureusement qu'une certaine modernisation est
intervenue parce que la ponction sur les milieux en fait sur les forêts etc elle commençait à
devenir quand même un peu compliqué même à l'époque des grecs en fait ils avaient déjà pas
mal ponctionné leur foyer donc la vision qui existait notamment en allemagne d'une graisse originale
etc était déjà une vision complètement idéalisée donc l'un sans l'autre la sobriété
sans efficacité ou efficacité sans sobriété ça fonctionne pas et tout l'enjeu c'est d'arriver
à les faire fonctionner ensemble et puis il y a cette troisième dimension effectivement du
renoncement tout à fait qui peut être prévendé dans la continuité de la sobriété si notamment
la sobriété ça suppose des changements en termes de production de consommation peut-être ça
veut dire ne plus produire un certain nombre de choses peut-être arrêter de produire des SUVs
manger moins de viande moins de viande rouge etc en tout cas va changer nos habitudes en
termes et de production et de consommation de manière solidaire je vais pas tout mettre sur le
dos de la consommation des consommateurs donc là effectivement on voit bien le lien avec le
renoncement parce que on tend finalement à épuiser peut-être la production la consommation de
certains produits et donc certaines filières etc pour autant il y a des exemples de renoncements
qui ne sont pas de même nature là on va dire qu'on est plutôt sur des renoncements
liés à des formes d'atténuation atténuer notre empreinte environnementale donc on envisage
toutes ces mesures là mais aussi des renoncements qui interviennent et vont intervenir de plus en
plus liés à des questions d'adaptation si on doit évacuer une ville en bord de mer parce que le
niveau de l'eau monte c'est pas une question de sobriété au sens propre il faut partir parce
que les conditions sont plus réunies pour qu'on puisse habiter là c'est plus vraiment volontaire
c'est plus volontaire c'est plus une question purement de sobriété s'il y a plus d'eau à un
endroit on aura beau être sobre ça marchera pas etc on peut essayer de l'éviter mais il y a des
moments où on bascule sur des logiques d'adaptation et là effectivement on n'est plus vraiment en
lien avec des questions de sobriété telles qu'elles ont été posées tout d'ailleurs donc il y a des
liens entre ces concepts mais en même temps il y a des différences à faire et je pense qu'il
va arriver à les maintenir en tension mais constructive tous les trois et éviter effectivement
se projeter dans un avenir on est soit dans le tout efficacité soit dans le tout sobriété soit
dans le tout renoncement et qu'en fait tout ça devrait arriver à faire système je rajouterais
peut-être encore une autre dimension dans la question des renoncements pour lesquels l'adaptation
n'est déjà plus possible je pense à l'élévation de température en fonction de l'altitude qui fait
que certains écosystèmes ou certaines espèces pouvaient vivre et était même seul je pense au
massif du sensi et je n'ai plus en tête un certain papillon et une certaine plante qui vivent que
à cet endroit là dans cette niche écologique sauf que cette niche écologique par élévation
des températures va les amener de plus en plus haut sur la montagne jusqu'à ne plus pouvoir
exister donc va faire disparaître cette niche et dans lequel du coup il n'y a plus de questions
d'adaptation là en est au delà de ça puisque c'est une question de deuil de soins palliatifs de
prendre soin de ce qui va encore vivre pendant un certain temps mais qui est voué à disparaître
à mourir auquel il a fallu renoncer oui tout à fait mais je dirais que cette question du deuil ici
elle est déjà quand même un peu présente dans certaines problématiques d'adaptation quand
on quitte une ville qui va être engloutie alors il y a une forme d'adaptation si on relocalise
les personnes ailleurs etc mais quand même une perte qui est une perte qui ne s'est pas remplacé
et le plus tragique en même temps ce qui témoigne aussi de tous les enjeux dont on parle ici de la
question des attachements c'est que dans ces situations là on sait très bien qu'il y a des
personnes mais à tout qui choisissent de rester qui savent que leur maison va être engloutie mais
finalement qui ne se voit pas vivre ailleurs qui ne se voit pas être relocalisé et qui préfère
rester jusqu'à la fin plutôt que de se déplacer ce qui évidemment est absolument abyssal comme
perspective et qui renvoie à cette question qu'on évoquait tout d'ailleurs des renoncements
le deuil est quand même là même si effectivement dans ce que tu évoques ici la disparition même
d'une espèce prend une forme tout à fait frappante et ben ça va être le moment de faire cette
transition donc j'en parlais tout à l'heure donc après avoir fait ses distinctions sobriété
efficacité renoncements c'est toi qui m'a amené à m'intéresser à la question de la suffisance
intensive raison pour laquelle j'ai invité natan ben kemoun au micro dans le troisième épisode
et justement dans ton dernier livre écrit avec natan tu consacres un chapitre sur la sobriété
pour mieux le nommer suffisance intensive alors j'imagine que suffisance intensive il y a des
irritages à l'intérieur de ça c'était travaillé tu vas nous le dire mais ce qui m'intéresse en
particulier c'est comment tu te racontes cette bascule là qu'est ce que ça te dit là aujourd'hui
que le chapitre où tu parles de sobriété bah c'est pour mieux ne pas en parler oui tout à fait
d'une certaine manière ça rejoint ce que j'expliquais tout à l'heure sur les conséquences du livre c'est
à dire on pourrait lire l'héritage et fermeture il a été lu un peu comme ça comme fermeture et
fermeture si on veut radicaliser le propos il faut tout fermer tout démentler c'est simple c'est
facile c'est ça que nous disent les auteurs etc ce qui devient vite un point de vue idéaliste
parce que quand on dit ça on a un discours qui est un peu rouli parce que si on veut appliquer
concrètement dans l'effet cette proposition pas se rendre compte quoi quand même de voir faire
preuve de plus de mots d'estis et d'humilité et que la réalité va un petit peu résister à cette
envie de tout démentler ce qui peut être un souci ça peut être un effet d'entraînement ça peut
même être utile pour plein de personnes finalement de s'approprier comme ça c'est pas une critique
c'est juste pour dire que ça n'est pas exactement le propos du livre après il peut donner lieu à ça
voilà ces livres là et c'est quand même d'être ancré dans une pratique cette pratique c'est
aussi une école d'humilité il faut quand même aussi qu'on indexe un petit peu ce qu'on dit sur
ce qu'on fait il y a inversement sensilimité parce qu'il faut passer l'existence c'est une
dialectique qui n'est pas simple mais il faut qu'elle reste là encore en tension et puis on pouvait
le lire comme héritage héritage finalement rien ne va changer parce qu'on va juste arrêter l'existence
sans soucier etc etc d'une certaine manière avec la sobriété on a un peu ces deux dimensions
c'est la sobriété et la suffisance la sobriété vue comme une diminution de notre emprunte matérielle
qui est absolument nécessaire je pense une dimension qu'il faut prendre en considération mais si on
veut penser les effets de notre discours on peut pas simplement arriver avec cette dimension uniquement
et puis aller voir les gens y compris des personnes qui ont déjà parfois pas grand chose sont en
situation fragile économiquement à tous égards en fait et leur dire bon en fait il faut aller vers
sobriété ça peut même être parfois assez obscène en fait toquer chez les gens qui sont déjà en
situation de précarité énergétique alors dit bah en fait écoutez il faut être encore plus ça
baisser encore le chauffage si vous plaît enfin si vous plaît ou non d'ailleurs on va vous le baisser
voilà là je pense quelque chose de problématique et donc ça veut dire que à côté de cette
diminution et qui une diminution pas égalitaire puisque non ceux qui sont les plus consommateurs de
ressources de biens etc etc doivent faire d'abord les efforts donc tout ça est quand même lié pour
le coup le jei que le dit a une nécessaire lutte contre les inégalités parce que si on
ne lutte pas contre les inégalités et qu'on veut amener des mesures de sobriété voire de
sobriété forcée qui sont souvent en fait des mesures qui s'appliquent aux gens qui sont dans
une perspective de sobriété subie que vous l'avez dit une ancienne ministre ce qui veut dire de
pauvreté forcément ça ne va pas bien se passer déjà il y a cette question de la lutte contre
les inégalités qui doit nécessairement se poser lorsqu'on pose l'enchoute de la sobriété et puis il
faut aussi dernière peut-être se poser la question des perspectives concrètes que l'on
ouvre c'est-à-dire si on enlève l'accès à une forme de consommation moi je ne me laiserai pas
immédiatement en disant regardez les gens consomment c'est vraiment pas bien ça ça peut être une
manière de compenser ça peut même être parfois une manière de résister enfin c'est assez complexe
il faudrait ici des ethnographies de la consommation pour éviter d'en dire juste quand
dit souvent les philosophes ou les théoresciens de l'écologie pour dire regardez les gens sont
complètement idiot c'est les consommateurs du capitalisme contemporain il n'y a rien à
en tirer etc. Dans l'état et si on enquête et je trouve que le travail que tu fais justement de
te mettre en enquête il est très utile pour ça on peut derrière proposer des discours beaucoup
plus fin beaucoup plus nuancé qui sont très utiles mais en tout cas si on veut aller au-delà il
faut effectivement investir la dimension non pas uniquement du moins la sobriété vu comme un moins
ce que j'appelle moi la sobriété quantitative il faut diminuer l'empreinte donc quantitativement
et à condition de lutter contre les inégalités on doit diminuer notre empreinte mais aussi se dire
qu'est ce qu'on réinvestit derrière ça est ce qu'on peut réinvestir une dimension qualitative
pour que malgré tout on ouvre des perspectives où on ne soit pas simplement dans le moins et un moins
qui soit imposé à des personnes qui sont déjà parfois dans le manque ou dans l'insatisfaction
parce que la consommation ça peut être aussi lié à une forme d'insatisfaction une manière de
compréhension de compenser d'aspiration tout à fait qui prend aussi les formes qu'elle peut
prendre c'est-à-dire c'est aussi ces formes qui sont à disposition des personnes s'il n'y a pas
d'autres formes c'est pas uniquement une question individuelle c'est une question sociale au sens
large donc est ce qu'on peut faire cette proposition qualitative d'un investissement finalement non
pas extensif la satisfaction qui passerait par la multiplication des biens ça peut rejoindre plein de
réflexion antérieure philosophique ou autre mais par justement une forme d'épanouissement mais
qui ne nécessite pas une empreinte matérielle très importante et d'ailleurs il n'y a pas
d'obligation à ce que l'épanouissement passe par une empreinte matérielle importante l'empreinte
matérielle peut être aussi une manière de compenser quelque chose qui n'est pas de l'ordre de l'épanouissement
en tout cas voilà ouvrir cette discussion là il m'a semblé que le travail de natan ben kemoun sur
la suffisance intensive était extrêmement important de ce point de vue parce que c'est la question
qui permettait de mettre au centre et que cette question venait enrichir notre compréhension de la
sobriété alors parfois d'ailleurs quand tu parles suffisant s'intensif ou j'explique il faut aussi
retrouver des dimensions de plaisir de satisfaction peut aussi avoir des réactions de personnes sont
plus en mode effondriste classique mais non tout ça c'est de l'illusion de toute façon on va
avoir du sang des larmes c'est pas possible et donc il faut complètement évacuer cette dimension
je l'entends je l'entends tout à fait d'où parle ces personnes se projettent dans des scénarios
où effectivement la survie elle-même sera pas du tout assurée donc parler même de ces questions
là peut leur sembler obscène d'une certaine façon quoi que ça se posait pas mais je pense que si on
veut poser les enjeux politiquement aujourd'hui donc à date dans les contextes dans lequel on est
qui pas encore complètement effondré il y a encore des gens qui font des choses qui ont des loisirs qui
se projettent dans des réalités complètement différentes pour demain que ces réalités là
donc politiquement qui n'ont pas du tout la même direction et bien il faut arriver à proposer ces
enjeux à également montrer qu'on n'est pas uniquement focalisé sur le moins le retraite
etc mais qu'on peut réfléchir à d'autres modes d'organisation d'autres modes de dérivation
de forme comme je vous indiquais tout d'ailleurs de satisfaction de plaisir de contentement et
arriver à donner une place à tout ça mais qui ne soit pas une place en même temps mensurgière
que ce n'est pas une place qui passe uniquement par j'allais dire la croissance économique l'accumulation
de richesse et à condition qu'on ait cette croissance et l'accumulation de richesse on
pourra espérer que d'une manière ou d'une autre et bien il y a une sorte de ruissellement de la
satisfaction de l'accès au divertissement au bien de consommation etc non il faut revoir
effectivement cette cette dimension là mais je pense que c'est une piste à la fois de recherche
en temps pratique extrêmement féconde et nécessaire quand une fois pour qu'on puisse dès
maintenant poser ces questions politiquement qu'on les rende légitimes y compris vis-à-vis des
personnes qui ne sont pas convaincues par ces perspectives à des personnes qui ont déjà une
sensibilité à l'écologie qu'on eut andré gorse voilà ou plein d'autres héroïciens évidemment
c'est des personnes qui vont être d'emblée sensibilisées à leur jeu de la sobreté mais
quand même beaucoup de personnes aujourd'hui qui n'y sont pas sensibles je suis pas sûr d'ailleurs
qu'il y a un accroissement de la sensibilité y compris dans les jeunes générations je pense
pas qu'il y a un sens de l'histoire de ce point de vue là les jeunes générations auraient toutes
les qualités une maîtrise supérieure d'une numérique des outils technologiques puisque
ça peut souvent être ce qu'on entend bah je compte sur les jeunes bah je compte sur les
jeunes aujourd'hui je me dis de plus en plus oui bah plus tu comptes sur les jeunes plus
faut te mettre en mouvement parce que les jeunes comptent sur toi aussi exactement c'est ça
parce que c'est une manière aussi de leur mettre un poids sur les épaules qui est un poids très
difficile à assumer et pareil pour l'écologie depuis les grandes marches tout ce qui a été un
petit peu poste cop 21 notamment en france qui est quand même un mouvement très important mais qui
est favorisé compréculturellement par un événement d'OTA par déparution enfin il y a beaucoup de
choses qui l'expliquent là on est quasiment dix ans plus tard je sais pas si on est exactement
post pandémie en particulier dans la même dynamique je ne suis pas sûr du tout donc voilà
comment on arrive à rendre ces questions là plus légitime et effectivement à se poser cette
question qui l'a encore et tel même légitime du contentement de la satisfaction du plaisir pour pas
uniquement être dans le moins donc à la fois il faut penser le renoncement mais aussi il faut penser
d'autres formes de satisfaction et de contentement et éviter uniquement d'indexer le renoncement
sur une perspective morale ou le moins est forcément du mieux ce que je ne crois pas du tout
ok peut-être pour préciser un petit peu puisque dans le travail récent sur lequel tu m'as accompagné
je questionne sur ce mot justement et donc bien que je comprenne le concept mais finalement pourquoi
ne pas avoir utilisé sobriété intensif plutôt que suffisance intensif sur quoi tu t'appuies pour
plutôt préférer ce suffisance intensif à sobriété alors je me suis vraiment complètement
appuyé sur le travail de natan je pense c'était vraiment le choix au départ de natan qui me semblait
d'ailleurs intéressant parce que décalant la perspective classique de la sobriété en allant
vers le choix d'un autre terme sur lequel tu as beaucoup travaillé peut-être que tu peux en dire
debout juste après parce que tu es quand même voilà essayer de comprendre pourquoi ce terme
avait été proposé au-delà du terme de sobriété et donc ce décalage me semblait intéressant
mais si effectivement tu l'as dit on aurait pu parler de sobriété extensif sobriété
intensif mais je pense qu'il y a eu comme une contradiction dans les termes en parlant de sobriété
intensif c'est à dire d'une recherche sobre la sobriété alors oui elle est sobre matériellement
mais elle n'est pas forcément sobre dans l'intensité qu'on va rechercher
et il n'y a pas de jugement moral qui est posé sur l'intensité en question si on arrive à avoir
une activité extrêmement intense mais qui soit pas avec une emprunte énergétique ou
emprunte matérielle forte moi c'est très bien l'activité elle n'a pas besoin d'être sobre
à son vécu à son ressenti etc et peut-être par intense j'ai envie de préciser quand même que
c'est intense dans une intensité de vie ou dans un épanouissement qu'on pourrait presque opposer
tu vois à la recherche de l'intensité pour l'intensité de l'excitation de l'adrénaline de la prise
de risque qui pourrait être assimilée à intense mais c'est pas le sens que vous lui donnez
non tout à fait même si après la frontière peut être mince évidemment entre les deux
là encore je vais pas trop moraliser et dans cette quête là parce que c'est aussi une exploration
c'est aussi une enquête comme tu le dis très bien on peut un moment basculer de l'autre côté
effectivement tomber dans des addictions des choses comme ça etc etc mais je dirais que ça peut
toujours arriver voilà c'est le risque voilà c'est le risque et sans qu'on puisse mettre une frontière
absolument étanche entre les deux et typiquement alors un exemple qui renvoie d'ailleurs pas
mal à la sociologie d'Antoine Hennion je pense et peut-être aussi à notre travail de Natan
qui n'est pas forcément explicité comme tel mais typiquement voilà la sexualité c'est une dimension
qui est intense par définition mais qui n'a pas une base matérielle très forte et qui peut derrière
aussi évidemment comme tu disais amener aussi à des formes d'insensité différentes oui voir
d'addictions voilà voilà il y a tout ce spectre mais il y a beaucoup de moralisation évidemment
sur ces questions là mais en tout cas pas de mon côté donc je trouve que le terme de ce point de vue
là effectivement est plus adapté que le terme de sobriété pour compléter c'est rigolo parce que
j'étais pas vraiment parti de ce questionnement que je te pose sur ce chapitre du livre je l'ai noté
qu'à posteriori finalement cette distinction sémantique entre sobriété et suffisance intensive
mais mon questionnement a été de me dire ben le terme en anglais c'est sufficiency c'est le
terme qui est utilisé etc en français c'est sobriété qui est utilisé et si on cherche un
petit peu si on enquête un petit peu je vous invite à le faire si vous n'êtes pas convaincu
bah vous regardez quelques publications et l'explication très très vite vient en disant bon ben
en anglais c'est ce terme là qui est utilisé c'est sufficiency sobriété je le prononce très très
mal j'ai un accent pourri mais sobriété existe mais vous comprenez c'est pas du tout l'usage
qui en effet c'est pas sobriété énergétique c'est pas sobriété de consommation c'est sobriété
au sens alcoolique alcoolisme addiction et donc la traduction de sobriété vous pouvez
regarder des séries j'en ai eu il y a pas très longtemps c'est sevrage en fait où c'est abstinence
derrière bon très bien mais alors pourquoi en français sobriété est utilisé alors que
il y a aussi la sobriété par rapport à l'alcool et j'ai aussi eu des objections pour le titre de
ce podcast en cas de sobriété bah oui mais ça va faire penser si ça se trouve tu es en train
d'enquêter pour arrêter d'être alcoolique et c'est peut-être ça le sujet du podcast tu vois
donc en français aussi le lien sobriété et alcool existe donc bon ça me contentait pas ça me
satisfaisait pas donc j'ai voulu prendre au sérieux cette différence entre sufficiency et sobriété
et au final je me suis rendu compte que en français bah suffisance existe je me suis
rappelé remémoré puis après je suis retrouvé sur votre chapitre puis je me suis dit tiens qu'est
ce qui se passe là dedans et bon bah si on enquête un petit peu suffisance il a le mauvais goût
d'avoir une connotation négative en français être suffisant c'est être un peu hautein un but de
soi-même etc alors j'ai pas de preuve à ça il faudrait d'autres enquêtes scientifiques et des
études et linguistiques pour aller étudier ça mais je me suis dit tiens bah peut-être que en fait
finalement suffisance c'est en anglais parce que sobriété ça marche pas très bien et en français
on utilise sobriété parce que suffisance ça marche pas très bien et du coup je me suis dit si on
oubliait ces problèmes de connotation négative et si on les prenne au sérieux ces différences là
qu'est ce que ça nous dit est-ce que c'est vraiment pareil parce que les auteurs en français par
exemple utilisent suffisance et sobriété comme étant purement synonyme alors bien que ça
dit à peu près la même chose moi je trouve que ça ne dit pas totalement la même chose et en fait
la petite chose que je fais au-delà d'études et thémologiques etc c'est de se dire qu'est-ce
qui n'est pas suffisant ou qu'est-ce qui n'est pas sobre et quand on répond à ça on voit que ça
part pas du même côté qu'est ce qui n'est pas suffisant bah c'est qu'on n'a pas assez pour que
ce soit suffisant il y en manque on est dans un manque et qu'est ce qui n'est pas sobre bah pour le
coup c'est qu'on en a trop on est dans l'excès et là du coup on voit une sorte de complémentarité
entre suffisance et sobriété que j'explore effectivement dans ces travaux avec virage énergie
qui seront publiés prochainement et dans lequel on retrouve en fait finalement ton discours même
si tu pars pas du même point de départ donc je trouve ça assez intéressant ces complémentarités et
ces subtilités de langage quoi qui sont assez riches quand on les prend au sérieux en fait tout
simplement oui qui envoient aussi à des univers différents on pense que tu es sur abstinence quand
je parais de sexualité par exemple tout à l'heure on voit bien là qu'il y a une contradiction
frugalité ça renvoie encore à un autre imaginaire donc c'est vrai que ça nous permet d'envisager des
réalités je pense que le terme de suffisance ici il est d'une certaine manière plus large il peut
s'appliquer dans des contextes où on n'est pas forcément obligé de partager une certaine
philosophie de l'abstinence de la frugalité et où en même temps on sait qu'on doit diminuer notre
empreinte matérielle mais quels sont les formes de vie sur lesquelles on débouche derrière bah on
n'a pas une réponse d'emblée morale toute faite moral bah en fait c'est une forme de vie qui est
indexée sur la frugalité sur l'abstinence sur ceci ou cela non ce sont des formes de vie largement
à construire et qui peuvent sortir de ses paradigmes tout à fait peut-être une dernière précision
sur cette question des termes parce que tu évoques le terme frugalité j'avais ouvert un poste avant
l'été sur LinkedIn sur cette question suffisant sobriété et puis j'ai senti que j'avais ouvert
la boîte de Pandore du meilleur terme pour parler de ce dont on parle qui est toujours un peu
difficile délicat etc on n'est absolument pas de trouver le meilleur mot pour dire ce qu'on veut
dire parce que je pense que le meilleur mot pour dire ce qu'on veut dire n'existe pas il se
trouvera juste dans les pratiques dans ce qu'on vit dans ce qui est désirable dans nos pratiques
qu'on donnera à avoir dans nos pratiques et non pas dans le concept et dans le mot en tout cas
c'est ma perspective je dirais philosophique peut-être ontologique pour dire des gros mots
qu'on a utilisé dès le début de ce podcast accrochez vous voilà on explore les sujets bref en
tout cas tout ça pour dire que je trouve que tous ces mots ont leur place et qu'ils n'écrasent
pas et qu'ils ne se substituent pas au terme de sobriété que ça n'empêche pas que des renoncements
et des réduction d'infrastructure de consommation de ressources sont nécessaires aux échelles
collectives mais qu'elles nécessitent d'être pris au sérieux avec subtilité avec nuance en fonction
des publics en fonction des personnes et des collectifs concernés pour leur donner plus d'ancrage et
que le jeu n'est pas de trouver un mot pour tout le one fits for all mais plutôt d'être capable de
s'adapter aux différents publics et à ce dont on est en train de parler et que les concepts et
les mots ne suffisent pas à exprimer et à transmettre non tout à fait que les réponses sont
aussi à construire et dans leur diversité c'est à dire quels seront les réponses apportées par
des populations urbaines des pays du nord global des populations urbaines des pays du sud
global et il y aura évidemment énormément d'inégalités de diversité rien que à travers ces
catégories ou des populations que soient des populations rurales ou d'autres types de
populations et populations autochtones et encore dans des contextes extrêmement variables ce ne
seront pas les mêmes réponses les mêmes modes de vie etc etc et donc c'est vrai que c'est difficile
d'arriver avec un terme il faut être sobre ça va être la réponse pour tout le monde adapté alors
qu'en réalité ça va renvoyer à des multitudes de pratique de mode de vie qu'il faut être prêt
aussi à l'envisager peut-être pour conclure cet échange à ce stade de notre conversation j'aurais
envie de revenir à cette question des axiomes du referentours et ça me donne envie de rajouter quatre
aux trois qu'on a proposé quatre tous en lien avec la sobriété alors que notre point de départ
n'était pas lié à la sobriété donc je vais juste rappeler les trois premiers dont on a beaucoup
discuté en début cet épisode donc le premier action nos héritages sociotechniques nous oblige
donc la question des héritages deuxième nous ne pourrons pas tout maintenir donc la question de
la fermeture et troisième les personnes sont expertes de leur attachement et donc à ces trois
premiers j'aurais envie d'ajouter d'abord le quatrième axiome de la redirection écologique il faut
réinvestir notamment le geste et la répétition comme contentement dans la sobriété et pour peut-être
lui donner un peu plus de corps je vais te citer l'interview qui est sorti le 23 février 2024
sur le média l'adn tu écrivais pensez quelque chose de primordial comme dérivé du plaisir et de la
satisfaction dans le moins pour prouver le contentement dans la sobriété il faut réinvestir
d'autres dimensions le geste et la répétition par exemple cela passe par des activités ne
nécessitant pas une multiplication d'objets sous la forme de marchandises et par l'intensification
du rapport à l'objet à d'autres personnes à l'espace il faut remplacer la finitude par l'infini
et non par l'illimité c'est à dire la multiplication des biens l'infini c'est autre chose c'est le désir
ça fallait vraiment écho à ce qu'on se disait juste avant mais est-ce que tu veux compléter oui
je peux compléter alors dire que cette question du geste et la répétition elle vient quand même
aussi largement du travail de natan je crois que ses premières réflexions sur la question elle venait
notamment de son analyse de la lecture cette idée qu'on peut lire relire et qu'en fait quand on
relit c'est pas simplement relire la même chose c'est matériellement le même livre mais on ne le
réinvestit pas de la même manière on découvre de nouvelles choses comme quand on regarde un film
et des gens qui sont obsédés par un film qui regarde le même film des dizaines ou des centaines
de fois est ce qu'est très bien par ailleurs on peut avoir quasiment une bibliothèque qui serait
composée d'un seul livre pour peu qu'on le lise et qu'on le relise mais pour le relire il faut
déjà sortir d'un rapport d'extériorité on va dire à l'objet et l'activer voilà à activer cet
objet l'enjeu c'est aussi de trouver ou de donner du goût aux choses trouver ou donner parce que c'est
un entre deux entre ce que l'on trouve et ce que l'on donne on trouve pas forcément un monde déjà
tout fait et en même temps il y a du répondant en face donc c'est un peu un entre deux entre une
position on va dire réaliste et idéaliste un peu cette perspective là aussi qui essaye d'ouvrir
un certain pragmatisme en tout cas et donc donner trouvé du goût la saveur aux choses mais pas
comme des choses inertes justement comme des choses qui peuvent répondre comme des choses qui peuvent
être activées comme ce que les pragmatistes justement appellent des pragmatas en grec c'est
à dire des choses qui sont effectivement dotées d'une certaine forme d'agentivité de virtualité et
quand on entre en relation avec elle qui en retour produisent quelque chose et nous produisent
également et donc c'est vraiment aussi dans cette relation là je pense que se joue quelque
chose de très important et donc ce qu'on appelle l'infinitisation du désir c'est d'une certaine
manière cette capacité ou faculté dans une espèce de dialogue à trouver de la saveur dans le monde
et activer aussi ce qui nous entoure et d'éviter justement une forme d'épuisement et de réduire
les choses en faire de pragmatas des choses inertes dans un monde inert et avec lesquelles
on va rentrer en relation de manière là encore peut-être une relation de domination d'extraction
etc etc donc je pense que cette position elle est aussi importante et que de ce point de vue là
entre les perspectives d'infinitisation du désir et la perspective pragmatiste d'exploration et
d'enquête finalement une enquête pour trouver donner du sens et du goût aux choses il y a une
affinité même si les bases sont différentes les perspectives sont en partie différentes mais il
me semble qu'il y a une affinité et effectivement sur laquelle on peut s'appuyer aussi pour nourrir
cette perspective de la suffisance intensive très bien cinquième action on l'a déjà beaucoup évoqué
mais je le repose là c'est nous devons articuler efficacité et sobriété et peut-être j'ajouterai
aussi renoncements ensemble dans un même geste dans un geste de conception socio-technique et non
les opposés il s'agit donc pas de miser ni entièrement sur l'efficacité comme une sorte de
technosolutionnisme ni entièrement sur la sobriété qu'on pourrait caricaturer comme une sorte de
retour en arrière anti-tech anti-modernité ou anti-civilisation même et donc de bien réussir
à articuler efficacité et sobriété et renoncements que j'avais pas mis je pense que c'est effectivement
fondamental comme je le disais tout à l'heure et ce qui oblige d'une certaine manière à négocier
ces imaginaires ces options politiques parce que on peut facilement avoir un imaginaire indexé sur
l'un des trois sur le renoncement le tout renoncement sur la sobriété le tout sobriété
et ou sur le tout efficacité pour aller encore dans une autre direction et d'une certaine manière
ça oblige à se soucier de ces dimensions quand bien même on aurait une idéologie, une esthétique
qui pencherait plutôt d'un côté que de l'autre même si on a une idéologie inesthétique qui va
du côté du renoncement de la sobriété etc on est obligé au regard des scénarios qui nous sont
soumis et des meilleurs années dont on dispose aujourd'hui de se soucier de la question de
l'efficacité donc je sais comment on s'en soucie comment on l'intègre à sa propre démarche plutôt
ou de dire maintenant finalement ça je ne vais pas m'en soucier je vais le laisser de côté je ne vais pas
le considérer parce que ça ne rentre pas dans mon cadre idéologique etc néanmoins ça reste quand
même dans la réalité quelque chose d'anti-fault se soucier auquel il faut faire une place y compris
voilà en négociant avec ses perspectives idéologiques mais je citais tout à l'heure de Jackon à savoir
cette idée que dans tous les cas quel que soit le scénario politique vers lequel on va il faut
prendre en charge cette dimension et de la sobriété et de l'efficience ça nous permet quand même de
décaler l'enjeu en disant bah voilà c'est pas attaché à un scénario possible il y en a plusieurs
et du coup on peut quand même faire une place à cette dimension là dans les perspectives qu'on
propose y compris des perspectives radicales qu'on propose mais il faut quand même y faire une place
donc oui oui pour moi c'est aussi fondamental et tu as raison j'en ferais volontiers un axiome
également et dans le prolongement en fait vraiment dans la continuité exactement de ce qu'on est
en train de dire un sixième axiome que je pourrais proposer et je pense qu'il est vraiment au coeur de
la redirection écologique c'est que il n'existe pas de solution pas de solution qui permet de tout
gérer on a parlé un petit peu tout à l'heure sur la question du nucléaire et on vient d'en parler
là dans cette perspective de efficacité sobriété renoncement dans ce triptique là ben c'est un peu
en articulant les trois sans cesse et en plus en le réactualisant parce qu'il y a dix ans c'était
pas la même chose qu'aujourd'hui etc donc il n'existe pas de solution et j'avais écrit un peu
autrement en préparant cet épisode en te citant ce que je crois que je l'ai attrapé quelque part
dans l'interview d'une lecture nous devons choisir aujourd'hui les problèmes que nous voulons gérer
demain autrement dit si je le relis au troisième axiome que je disais tout à l'heure sur la question
des attachements il ne suffit pas d'enquêter sur les attachements il faut aussi compléter cette
enquête sur les problèmes à long terme que chaque arbitrage va faire émerger pour être capable
d'avoir cette discussion ou cette enquête finalement sur les problèmes que nous voulons
gérer demain il faut bien rajouter à la question des attachements cette question des problèmes à
long terme que penses-tu de ce sixième axiome écoute l'encore je le partage bien volontiers c'est
vrai que dans la perspective du travail que je développe autour des communs négatives dont
on n'a pas parlé jusqu'ici qu'une notion voilà que j'ai proposé il y a quelques années déjà
maintenant cette idée qu'on hérite un certain nombre de réalités qui sont problématiques et
que la question qui se pose c'est de savoir quelle trajectoire leur donner parfois ça va signifier
les mettre de côté parfois ça va signifier les démanteler parfois vivre avec en certaines conditions
enfin voilà c'est un petit peu au cas par cas mais en tout cas ça nous oblige à poser ces enjeux
là et donc à aller explorer cette dimension nuancée contrastée de la fermeture ou défermature
ou plurielle et donc ce que je dis souvent c'est qu'effectivement plutôt de chercher
une solution qui va faire disparaître le problème souvent les choix qui nous sont laissés c'est
plutôt quel problème on va léguer demain et quels problèmes vont être traitables demain ou non et
que si on pensait nos choix par rapport à ça on dirait non pas bon on a de la solution parfaite et
absolue donc c'est évidemment vers ça qu'il faut aller mais que les choix qu'on va faire sont
dans tous les cas relativement problématiques parce que j'allais dire exister c'est relativement
problématique en fait et bien on factoriserait effectivement cette dimension et ce ne serait pas
une surprise qu'il y ait des problèmes ce serait en fait une composante normale si on ajoutait une
dimension à l'existence humaine à côté de la production à côté de la reproduction qui serait
une dimension de soins qui est liée à ces comaniatifs et aux problèmes qu'on ne cesse de générer et de
faire des choix finalement de savoir quel problème vont être plus facile à traiter par ceux qui vont
nous suivre ou les générations futures plutôt que d'autres et que ça oriente aussi notre action et
que cette dimension du soin à apporter à ces comaniatifs et à cet ensemble de problèmes que
j'évoquais et peut-être une dimension fondamentale en réalité qui est souvent nier on cherche des
solutions sans arrêt des solutions des solutions des solutions et puis c'est étonnant qu'on cherche
autant de solutions on continue ça veut dire quand même qu'il y a des problèmes qui ne cessent
de surgir donc ça devrait nous alerter et du coup là il y a peut-être une bascule à opérer et
d'essayer de réfléchir à quelque chose qui m'intéresse beaucoup qui est effectivement quelle
économie du soin on imagine pour la prise en charge de ces communs négatifs qui en fait sont tout
autour de nous on va déléguer tantôt à un état qu'il n'y a pas forcément toujours d'ailleurs
s'en occuper ou alors si on vient des petits collectifs affinitaires on essaie de s'en occuper à
plusieurs mais pas forcément toujours à la bonne échelle en tout cas il y a vraiment une bascule à
opérer et peut-être une partie de notre existence en réalité elle pourrait de vrai va parce que
ces communs négatifs se multiplient vont se multiplier notamment sur le versant environnemental
être dédié aussi au soin à porter quand je dis soin ça peut être aussi de ce compagnatif
assez commun négatif mais encore une fois la question matériel qui se pose c'est est-ce qu'on a
une économie politique qui le permet aujourd'hui ce sont des organisations et des organisations privées
de plus en plus qui sont chargées de le faire soit via le marché soit une délégation de l'état ce qui
est intéressant c'est que le soin à porter un commun négatif comme les déchets nucléaires n'a pas
été délégué à une organisation privée à une entreprise c'est l'andra qui quand même chargé de
s'en occuper c'est à dire une institution qui n'a pas le même rapport au capital qui n'a pas le
même rapport au temps et ça n'est pas du tout anodin donc quelle forme institutionnelle on peut
imaginer alors institutionnelle parce que j'ai tendance à penser qu'on peut difficilement se
passer la dimension institutionnelle mais d'autres voudront des formes plus destituantes peut-être
mais quelle forme on peut imaginer et quelle économie parce que c'est quand même difficile je pense
d'en sortir d'un coup d'un seul on peut imaginer concrètement pour s'occuper de tout ça je pense
qu'il y a là un enjeu absolument fondamental et très profond parce que ça veut dire aussi une
réorganisation des rapports de pouvoir de l'économie politique etc mais ça peut être en tout cas
un axe qu'on adopte pour repenser ces différentes dimensions merci il me reste un septième et
dernier axiome, il faut éroder notre dépendance
à la technologie tout en factorisant deux composants l'attachement de certains aux éléments
techniques et l'utilité de certaines infrastructures donc se poser ces questions donc c'est, encore
une fois ça nous renvoie à l'enquête qui est un peu au centre de la redirection écologique mais
cette question de éroder notre dépendance à la technologie est-ce que tu l'élèverais au
rang axiome est-ce que c'est un sous axiome enfin comment tu le vois je sais pas si je dirais à la technologie en
général parce que je pense que la technologie ou la technique est une dimension constituante de
l'humanité et que donc peut-être par rapport à certaines approches je pense que ce sont des
approches d'ailleurs forcément technocratique ou autre mais des approches en tout cas anti-tech
je pense pas qu'on peut liquider cette dimension il y a une part constitutive de l'humanité qui
est une part je dirais inhumaine ou à humaine que sont aussi nos artefacts et les milieux dans les
quels on évolue qui sont marqués aussi par la présence de ces artefacts ce qu'il faut
plutôt peut-être éroder c'est notre rapport à un certain métabolisme technique marqué par
effectivement le développement de technologies zombies ce dont José Halloy parle dans ces
travaux donc c'est plutôt éroder notre dépense à un métabolisme technologique zombie que on va
dire à la technologie mais dans ce cas oui tout à fait d'accord peut-être juste pour rappeler que
ce que José Halloy appelle une technologie zombie donc le métabolisme qui lui associait c'est une
technologie qui s'appuie sur des stocks de ressources et donc quand on ne peut pas forcément
projeter l'utilisation sur des milliers d'années parce que les stocks en question vont s'aménuser
ou est de moins en moins disponible et lui il essaye de penser la technologie sur le temps long
dans une perspective de soutenabilité forte donc ça veut dire pour lui ce sont des technologies
qui sont déjà mortes à l'instar des zombies parce que on sait qu'on ne pourra pas se projeter
avec ce métabolisme là sur des milliers d'années et d'autre part des technologies qui n'arrivent
pas à mourir parce que ne s'inscrivant pas dans les grands cycles biogeochimiques ne sont pas
des technologies qui sont compostables il n'y a pas de notamment pour le numérique de cycles de
l'indium du gallium du silicium etc etc même s'il y a des puces avec une base carbone mais c'est
quand même très minoritaire et c'est pas l'essentiel de la technologie numérique bon elles sont beaucoup
moins efficaces mais voilà et donc ils n'arrivent pas à mourir donc c'est comme le zombie c'est la
même dualité que le zombie et la fois déjà mort et en même temps il n'arrive pas complètement à
mourir dans cette espèce d'entre-deux ce métabolisme il est aussi de cette nature et ça s'explique
évidemment par le recours à certaines sources d'énergie avant tout un ensemble de facteurs la
question de savoir comment on sort effectivement de ce métabolisme là étant une question extrêmement
importante une question extrêmement politique aussi donc pas politique au sens où on dit
c'est une question politique donc la dimension technique disparaît c'est une question politique
et technique c'est à dire qu'il faut que les questions politiques intègrent la dimension
technique et montrer que la technique intègre une dimension politique c'est vraiment dans les
deux sens que ça fonctionne on peut pas dissoudre la question technique tout ça est politique et
finalement bascule sur la politique à la papa très classique on parle plus du tout de cette
dimension technologique anthropologique fondamentale non au contraire il faut continuer à parler mais
le fait même d'en parler c'est éminemment politique donc finalement ce septième axiome tu me proposes de
le modifier un petit peu en disant plutôt il faut éroder notre dépendance à certaines technologies
un grand merci Alexandre pour ce long échange j'ai envie de préciser qu'il y aura une suite à notre
échange on va continuer ça donc restez à l'écoute soyez encore présent mais merci beaucoup Alexandre
avec plaisir merci beaucoup
j'espère que cet épisode vous a plu grâce à ses partages d'écoute et de réflexion de
discussions authentiques de doute de contradiction et de joie simple du quotidien j'espère vous
donner envie de mener votre propre enquête pour construire collectivement une alternative aux
exploitations entoujant
je remercie Emeric Priolon pour l'habillage et le montage sonore Ingrid de Saint-Aubin pour
l'habillage visuel Barbara Nicoloso directrice de Virage Énergie pour sa commande sur la sobriété
Alexandre Monnin et toutes les personnes du master stratégie design pour l'entreposène pour
leur soutien et leur enthousiasme et bien sûr mes invités sans qui ces épisodes n'existeraient pas